i-expo 2006 : les bibliothèques numériques européennes
La semaine dernière se déroulait au CNIT à Paris la 23e édition du salon i-expo consacré à l’information numérique comme à la veille et l’intelligence économique. Organisé sur deux jours, le salon mettait en scène plus d’une centaine d’exposants (producteurs d’information, éditeurs de logiciels, intermédiaires…) et proposait présentations de produits et conférences publiques ou payantes.
C’était ma première participation. J’avoue au début avoir été impressionné même si j’ai trouvé le salon un peu petit par rapport à ce que j’imaginais (et apparemment je ne suis pas le seul). J’en ai finalement vite fait le tour et les rencontres avec les exposants ont à peine suffit à combler le temps que j’avais prévu d’y consacrer. Le mercredi après-midi, j‘ai ensuite assisté à une plénière sur les bibliothèques numériques européennes et le jeudi à deux plénières sur les Nouvelles stratégies de production et de diffusion de l'IST et sur Blogs, wikis, fils RSS : de nouveaux modes de production et de diffusion de l’information.
J’essaierais de faire des comptes-rendu de ces deux dernières conférences si j’en ai le temps entre deux révisions. En attendant, voici ce qui s’est dit à la plénière sur les bibliothèques numériques européennes :
Cette dernière regroupait autour de Louise Guerre (du magazine Archimag ai-je cru comprendre) Jans Redmer, responsable européen du projet Google Book Search, Jean-Noël Jeanneney, président de la Bibliothèque nationale de France, Julien Masanes directeur de la Fondation European Archive et représentant du projet Open Content Alliance et enfin Christian Stertz venu nous présenter la politique allemande autour des bibliothèques numériques scientifiques.
JN Jeanneney a d’abord tenu un discours assez offensif, soulignant les trois grandes questions selon lui que posait la mise en place d’une bibliothèque numérique et qui sont
Il a rappelé l’importance qu’il fallait donner à un souci mondial de diversité culturelle, comme à des niveaux européens, francophones, et la nécessaire recherche de financement publics et commerciaux.
Jans Redmer a répondu que l’interface du moteur de Google était traduit en plus d’une centaine de langues et que GBS l’était déjà dans les langues les plus importantes, soulignant par là l’importance que la firme accordait à la notion de diversité justement. Il a rappelé que leur objectif était de donner accès à la culture pour tous en proposant tout ce qu’on pouvait trouver dans une bibliothèque. Puis il a tenu à préciser que GBS recouvrait en fait deux programmes différents :
Un premier programme Publisher program en direction des Editeurs qui ne proposait l’accès qu’à 20% maximum du livre numérisé, par l’internaute
Un second à destination des bibliothèques Library program qui offrait accès au plein texte si le livre est dans le domaine public, à une seule notice avec lien vers la bibliothèque la plus proche dans le cas contraire. Des publicités ne seront proposées que dans le premier programme, s’il y a accord des éditeurs.
Julien Masanes a d’abord expliqué en quoi consistait l’Open Content Alliance, alliance de bibliothèques, centres d’archives, moteurs (Yahoo, MSN), organisations professionnelles (RLG, OCLC) et entreprises (Adobe) autour d’une même volonté de promouvoir un accès ouvert pour toute la culture, et pas seulement livresque. Un accès libre, mais soucieux du droit d’auter. L’enjeu selon lui est de savoir si les grandes bases de documents numériques qui se constituent le seront sur le modèle du web (à savoir un espace ouvert librement indexable) ou de celui plus fermé des bases de données des années ’70 où l’information était enfermée dans des silos. A partir de cette idée, l’OCA travaille sur les questions de formats, de métadonnées, de numérisation, d’échange de fichiers, de coordination des politiques de collection mais également sur la mise à disposition gratuite d’infrastructure de stockage et d’accès.
Enfin, Christian Stertz a présenté le projet allemand Vascoda qui consiste à fournir une information pertinente aux chercheurs. Si j’ai bien compris, une requête interroge différentes bibliothèques numérique spécialisées. Puis il a parlé des changements apportés par le numérique dans les pratiques des chercheurs (pratiques plus collaboratives) et des usagers. Mais j’avoue humblement avoir suivi avec difficulté cette intervention en anglais alros que je n’avais pas de casque.
Le débat ensuite a permis d’apporter quelques précisions sur ces différents projets.
Ainsi, la première question a-t-elle porté sur les volumes en jeu, ce à quoi JNJ, appuyé en cette vue par M. Masones a d’abord souligné l’importance d’un double financement public et privé de façon à éviter que la publicité et donc une logique commerciale n’occupe trop de place. Le financement privé peut également venir de mécénats, et surtout respecter les droits d’auteurs, quitte à mettre en place un système de micro paiement. Jans Redmer à lui rappelé alors que Mountain View avait investi 250 M$ dans le projet de GBS et visait fin 2006 100.000 ouvrages numérisés. GBS n’a pas de business model, c’est un innovative project. En revanche, puisque 75% des livres sous droits ne sont plus disponibles (la zone grise de l’édition) il leur faut tout indexer pour donner à redécouvrir. Charge à l’éditeur ou l’auteur le cas échéant de se manifester.
La seconde question a porté sur les critère de sélection et la cohérence des fonds de telles bibliothèques. M. Jeanneney a alors répondu que dans le domaine de la Culture, il fallait privilégier un équilibre entre l’offre et la demande, que si l’offre devait jouer un rôle essentiel, il ne fallait pas pour autant privilégier le succès et instaurer une certaine validation par les organisations culturelles. Il a alors insisté sur le caractère organisé de telles collections, favorisant la création de Corpus ; véritables fil d’Arianne pour comprendre le monde d’aujourd’hui et d’hier.
Quelle incidence pour les professionnels de la documentation ?
Julien Masones a d’abord montré qu’internet changeait nos pratiques, le rôle du bibliothécaire, libéré de la matérialité du livre glissant du stockage à la mise en valeur des collections. Nous sommes plus que jamais des passeurs.
Face à la masse informationnelle, l’accès organisé, raisonné du savoir apparaît d’autant plus important. Notre rôle n’est plus seulement de donner accès au contenu mais bien d’aider les usagers, de les accompagner et de répondre à leurs besoins. Nous devons avoir un rôle plus offensif, sans croire pour autant que nous sommes incontournables : nous devons aujourd’hui être tout autant attentif aux autres intervenants sur la Toile, à ce que font les internautes sur les blogs, avec les folksonomies…
Interrogée en tant que présidente de l’ADBU, Marie-Dominique Heusse complète cette réponse en précisant que les BU ne désemplissent pas. La communication des documents en ligne, en son établissement de Toulouse 1, est égal au nombre de prêts. En fait, l’offre numérique ne modifie pas le rôle de la bibliothèque qui est de répondre aux besoins des usagers. Cependant elle induit de nouveaux problèmes :
Enfin Jans Redmer plus tard ajoutera que les bibliothécaires demeurent indispensables, le moteur de Google n’étant qu’une simple concordance mécanique entre une requete et des index.
Dans les questions avec la salle concluant la séance, JN Jeanneney a rappelé l’importance de la pérennité des collections, problématique nous n’avions pas eu le temps d’aborder tandis que Louise Guerre concluait sur la richesse de la diversité de ces projets, apte à contrer toute tentative de monopole.
Voir aussi le dossier consacré aux bibliothèques numériques dans le dernier numéro de la revue Archimag.
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